Niveau : 4°
Durée : 5 ou 6 mois
Matières : Français ( V. Pergola ) et Musique
Dans la mouvance des escape game, ces jeux de rôles grandeurs natures qui se déroulent, comme une murder, dans un espace fermé et dont le but, par une série d’énigmes successives, est de sortir d’une pièce dont les éléments sont scénarisés, cette année au collège nous allons réaliser un Art Escape Game.
Le but de ce travail sera de construire dans une pièce une succession d’événements sonores et littéraires, comme un système d’alarme mais contrôlé. C’est aussi vieux comme procédé que le théâtre d’ombre.
J’aimerais y associer l’informatique pour laisser le corps libre, c’est ainsi que nous utiliserons des capteurs arduino, des makey makey, reliés au logiciel MAX MSP et à des enceintes. Il s’agira alors pour l’élève de créer une chorégraphie déclenchant les évènements sonores. L’élève va créer sa musique par son mouvement, l’instrument devenant une pièce. Par la mobilité du matériel, cette installation interactive pourrait prendre place dans différents lieux.
Je n’ose imaginer une connexion à distance des évènements sonores qui pourrait ajouter une dimension connectée, je pense aussi à une absence du numérique totale remplacée par des improvisateurs qui pourrait donner lieu à un travail d’observation et d’écoute, ce serait un opéra improvisé en quelque sorte… L’idée me séduit aussi…
Ces évènements seront scénarisés par les élèves eux-mêmes qui vont construire tout ou partie du jeu, comme un cluedo interactif, en fonction des matières qui se joindront à nous car nous le lançons en Français-Musique. Nous espérons en la Technologie, en l’EPS et dans les Arts Plastiques, même si les Mathématiques, la SVT, la Physique et les langues peuvent s’y inclure avec évidence.
Je vais y décrire ici la feuille de route générale :
Dans les premières séquences, les élèves vont en écrire l’histoire. Nous fonctionnerons par ilots ludifiés, chaque ilot ayant une tablette dont l’écran sera reflété au tableau afin que chacun puisse voir en se déplaçant le travail des autres. J’ai pensé à créer un document collectif mais je considère que cela pourrait nuire à la concentration de chaque groupe et défaire de l’effort engager le corps même dans une démarche de curiosité. J’opte pour des documents séparés mais tous retransmis au vidéoprojecteur en même temps.
Nous allons dans un premier temps déterminer le nombre de parties de l’histoire, orientés par un canevas intangible : un/e héros/héroïne qui enquête, un/e coupable, un/e victime, des suspects ( 2 ou 3 ). Nous déterminerons aussi les lieux (3 lieux), l’époque. Le genre sera forcément policier.
Un lieu peut être une pièce d’une maison, un quartier d’une ville, une ville dans le monde.
Nous procèderont en écrivant nos idées et en les dessinant, sur des feuilles de couleur ( une couleur pour un groupe ) , puis nous les sélectionnerons rapidement en les affichant avec des pinces à linge sur une corde comme nous avions fait pour le roman en musique dont vous êtes le héros et le site interactif.
Une fois le canevas de l’histoire installé, chaque ilot écrira la même partie et nous marquerons des pauses afin de sélectionner par vote la partie déterminée.
Chaque partie écrite, nous entrerons dans une phase de création musicale où les élèves réfléchiront à associer un bruit, une musique et/ou des dialogues représentatifs de leur scène.
Par exemple : si l’héroïne rencontre un suspect dans un bar, les élèves probablement pourront créer une ambiance de bar avec des gens qui parlent en fond sonore, une musique diégétique et un court dialogue résumant ce qu’ils se disent, interprété bien sur.
Une fois tous les sons créés par l’ensemble des groupes de la classe ( qui ne créeront peut-être pas les sons de la même partie tous, nous nous répartirons les devoirs), nous les plaçons dans une banque de données, probablement sur une clef.
Puis nous allons déterminer des objets réels ou en images qui pourraient correspondre aux événements et aux sons.
Par exemple : pour l’exemple de l’héroïne dans un bar, une bouteille . Si l’action se passe le matin, une cafetière. A midi , un verre à pied. Si l’action se passe le soir, une bouteille.
Par le logiciel MAX MSP qui consiste à créer des actions sur des environnements numériques électroniques, nous attribuerons les sons à des capteurs. Capteurs de mouvements par ultra sons, de lumières. Par les makey makey, le fait de toucher une partie conductrice actionnera le son comme un interrupteur.
Par exemple, en soulevant la bouteille qui laissera donc la lumière entrer dans un capteur photosensible, un son sera émis, son qui représentera deux aspects : un aspect descriptif de la narration et un aspect musical. La parole deviendra un matériau sonore à part entière en même temps que la narration d’une histoire.
Nous créerons enfin un teaser, une bande annonce, qui servira d’introduction au jeu. Nous allons mêler le numérique au théâtral : il y aura à l’écran une scène filmée comprenant un outil numérique de captation : un élève pourra utiliser un téléphone, un iPad, ce qui sera filmé et retransmis sur un écran.
Puis quand nous aurons tout installé, un ilot d’une autre classe viendra expérimenter la remise en ordre des éléments. Un talkie walkie servira d’outil de liaison entre l’ilot qui jouera et celui qui aura participé à la création du jeu. La classe restante observera le jeu qui durera 15 mn par ilot.
Quand la recomposition de l’histoire originelle sera opérée, les élèves devront le prouver en comprenant la trame, en marquant qui, quand, où et avec quoi l’assassin a frappé.
Ce sera enfin l’occasion de décomposer l’histoire et de se servir de l’escale game comme un instrument de sample. Les élèves devront réfléchir à une chorégraphie, une série de mouvement afin de créer un morceau contemporain. Parce qu’ils jouent en équipe, ils peuvent manier la polyphonie, le mélange de sample aisément.
Ils pourront ainsi recréer leur polyphonie de façon muette, en chorégraphie seule à la fin de leur travail.
Si nous arrivons à mener ce projet à son terme, nous aimerions inviter les parents d’élèves à expérimenter le jeu dans un moment de rencontre.
Je tiens particulièrement à remercier les #edmus :
Valentin Leroux qui m’a montré avec patience et gentillesse l’utilisation d’Arduino et de Max MSP et Anne-Claire Scebalt qui m’a grandement aidé et accompagné dans la compréhension de ces programmes ainsi que dans la construction du concept.
Je remercie aussi David Plumel qui va m’aider à y associer de la robotique, j’y vois aussi un développement possible avec les drones qui ne sont pas sans rappeler les travaux de Nicolas Olivier.
Il me paraissait intéressant de reprendre le système des objets connectés et des alarmes mais de le renverser afin que justement ce soit le déclenchement qui soit recherché et non l’absence de déclenchement. C’est une façon de remettre l’humain en place centrale de son environnement numérique, qu’il choisisse lui-même ses actions possibles dans une liberté créative, à l’image d’un holodeck de Star Trek mélangé à un instrument de type sampleur.
Outre les dimensions évidentes de collaboration entre élèves d’un ilot et d’autres classes, le geste musical, l’interaction avec le sonore et l’humain, la composition, l’apprentissage de l’écoute peuvent prendre sens dans une nouvelle façon d’agencer et de considérer les sons.
A noter en parallèle de ce travail, l’excellent dossier des cahiers d’ethnomusicologie sur le geste musical.
Magnifique travail qui mérite d’être repris en haut lieu pour montrer que l’enseignement de l’éducation musicale a changé et que l’intégration du numérique n’empêche pas les relations capitales entre humains!
Merci Rémi Massé de pousser si loin cette réflexion!!!
Merci Véronique, ce compliment me touche et m’encourage. Merci infiniment.
Je suis captivée par votre travail… Bref, entre les îlots bonifiés et votre démarche, je trouve que notre métier trouve tout son sens, et je découvre une nouvelle façon d’enseigner, encore une, qui permet aux élèves de passer un bon moment dans nos cours, qui leur fait gagner en autonomie, qui développe leur imagination etc. L’escape game m’intrigue tout particulièrement. Bref tout cela est d’une grande richesse ! Merci pour ce travail et le partage !
Merci infiniment pour ce retour extraordinairement positif, je vous en remercie chaleureusement !