La créativité 1 mythes, nature et définition

Une série d’articles d’apparence assez longue va venir autour de recherches autour de la créativité et de l’autonomie possible de l’élève en cours d’éducation musicale. Je décide de publier mes résumés de lecture en espérant partager des réflexions autour du phénomène de créativité, m’inspirant de géants de la pensée. J’ai choisi de commencer par l’ouvrage qui m’a le plus influencé, sur la créativité, en postant mes résumés et réflexions autour des premiers chapitres de :

La créativité en éducation et en formation

perspectives théoriques et pratiques

sous la direction d’Isabelle Capron Puozzo

préface

Jean-Rémi Lapaire

(édition deboeck supérieur)

http://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782807301894-la-creativite-en-education-et-formation

« Devant cet univers d’objets fidèles et compliqués, l’enfant ne peut se constituer qu’en propriétaire, en usager, jamais en créateur ; il n’invente pas le monde, il l’utilise : on lui prépare des gestes sans aventure, sans étonnement, sans joie. »
p.59 Barthes, R. (1957). Mythologies. Paris : Seuil
Cela pose la question de la joie et du plaisir, en renversant le paradigme que le plaisir vient sous la contrainte. La contrainte devenant un constituant de la créativité et non plus du plaisir, ce dernier n’est plus un but ou un éclat, un effet de ricochet ou une direction logique, mais un constituant direct de l’apprentissage. L’habitude de l’étonnement n’est pas la rencontre du déjà vu, même s’il constitue un jalon. L’étonnement est le moteur de la découverte des jalons, eux-mêmes créations et ont constituants de la créativité . Plus qu’une critique sociale, c’est un avertissement à la mort.

Dans les jeux pour enfant, on peut observer une grammaire de la démiurgie, « on disait …. qu’on était des enfants abandonnés… on n’avait plus de maison, qu’on avait fait naufrage, qu’il avait été chassé de la ferme ….etc » Les imparfaits disparaissent et puis ressurgissent lors d’une nouvelle règle. Il y a une grammaire du rêve éveillé et de l’invention contrôlée, permettant de déréaliser la réalité immédiate, de créer à l’infini des situations et des rôles.
La grammaire évolue à l’âge adulte : « imaginons que nous soyons des enfants, que nous ayons perdu notre mais » mais son fonctionnement reste le même.
( Fauconnier et Runer : la créativité par convergence et intégration de divers espaces mentaux dans un espace de mélange. Le blended space ).

Peut on y voir une analogie avec des algorithmes et des programmes informatiques , avec les codes symboliques de la musique ? Inventer son solfège serait prendre son monde intérieur en ouvrage. Lier son écriture au commun permettrait l’adjonction et non l’imitation d’une non-créativité conservatrice de sa propre photographie innovante. Est-ce à dire que Babel est à rechercher dans un incessant aller-retour entre un espéranto et une inner stimme ? Les # émotionnels répondent à ce méta-langage nécessaire à l’émergence de didascalies contenantes.
La stigmatisation de l’erreur, de l’écart de comportement rend difficile ce retour à l’étape d’audace inconsciente et jubilatoire, de dés inhibition confiante ( Ken Robinson 2006 ).
James Asher ( 1972 ) « d’une certaine façon, la langue s’organise autour d’une chorégraphie du corps humain ». Avec l’aide du chorégraphe Jean Masse, Jean-Rémi Lapaire crée de séquences de mouvements et des danses permettant d’expliquer la grammaire de l’anglais.
Approche multi sensorielle ? Synesthésique ? Si on se réfère aux émotions ( neurosciences ) qui s’apprennent en imitation du monde, apprend-t-on à voir, à sentir, à entendre ? Oui (Levy-Strauss) et le contexte environnemental, social, langagier nous y destine. La synesthésie serait-elle une interface nécessaire que l’homme a néantisée face au pouvoir du néocortex qui englobe tout dans un inconscient affairé à tempérer nos émotions et nos pulsions ?
La créativité est différente selon les contextes, les disciplines et les métiers.
Pour les métiers artisitques, c’est une véritable injonction identitaire. Pour d’autres c’est un interdit. Qu’en est il de l’enseignant ?
L’enseignant en art possèderait-il alors une double injonction ? Ou alors a-t-on perçu qu’il était plus facile de contrôler l’apprentissage en terme de voies plutôt qu’en terme d’individus ? Et de cette réduction nous en avons fait un habitus confortable, prétexte à nos contestations politiques traditionnelles ? La créativité en pédagogie est-elle, plus que possible, souhaitable ? Le parti opposé serait de laisser une liberté à la non liberté pédagogique. Paradoxe d’un confort recherché ? La société faisant oeuvre d’art car ses institutions sont le reflet d’une volonté de considérer l’individu dans sa liberté. Inclure aujourd’hui serait-il le véritable défi ? Inclure pour construire ? Dans une pédagogie musicale, le sample serait-il le prisme obligé (ainsi que son cycle connoté) de toute action musicale ? La répétition de sons nouveaux est-elle en soi l’image d’une nouvelle considération du temps ?
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une pédagogie de la créativité ?
http://www.education.gouv.fr/pid35270/le-conseil-national-de-l-innovation-pour-la-reussite-educative.html
Le Cnire définit une pratique innovante comme :
« une action pédagogique caractérisée par l’attention soutenue portée aux élèves, au développement de leur bien-êtr, et à la qualité des apprentissages. En cela elle promeut et porte les valeur de la démocratisation scolaire. Prenant appui sur la créativité des personnes et de tous les élèves, une pratique innovante repose également sur une méthodologie de conduite du changement ».
Pourquoi la création d’un tel conseil ?
difficultés croissantes face à l’hétérogénéité des élèves
mieux comprendre cette capacité transversale en analysant les pratiques
Aujourd’hui Eduscol prend ce rôle. Les GEP aussi. Penser l’innovation par la recherche de la créativité me paraît être important. Il y a je pense alors un dosage et une considération nécessaires à apporter dans un éclairage des créativités cachées et un adoucissement de la lumière de la diffusion des informations officielles.
1 Qu’est ce que la créativité au niveau théorie ?
2 Qu’est ce que la créativité en comparaison avec d’autres concept proches?
3 Quels en sont les contextes en pédagogie ?

1 Mythes de la créativité
Grèce antique : créativité associée à l’inspiration divine, à la muse, médiatrice entre les dieux et le poète. L’artiste devenait à son tour le médiateur sur terre qui inspirait la création mystique.
Beethoven en parle comme un esprit, Kipling en parle comme un démon (Lubart 2010).
Daimon en grec, l’idée, le djinn arabe, le génie. Nous sommes dans le monstrueux, l’étrange, le fou, l’idiot. Mais nous ne sommes pas dans l’obscène, le révélé, l’acte transgressif dans ce qu’il a de responsable. Nous sommes dans une conception déresponsabilisée de la création. C’est une légitimité du fou, une transe européenne.
XVIII : associée au génie, caractéristique innée et rare. On nait ou pas créatif (Robinson 2011).
parfois on a de la chance (Beaudot 73), il y a une créativité noble qui s’oppose à une créativité populaire. Cette idée du génie isolé de la société a participé de l’idée de la créativité associée au monde des arts, du design ou du management et à une idée de la supériorité de certaines disciplines. Pourtant toutes les activités artistiques ne sont pas créatives, c’est une vision romantique.
Le temps cyclique hégélien, le culte du héros, une exemplarité mystérieuse, la créativité échappe encore à chacun mais elle est permise, autorisée. Elle entre donc dans la société et la crée, permise par la raison du siècle précédent.
XIX et XX : remise en cause de la caractéristique exceptionnelle. Torrance, en réaction aux test de QI, élabore des test visant à évaluer la créativité.
En France, dans les années 70, on se basait sur les test de Torrance pour proposer des items stimulant la créativité tels que « imaginez si les nuages disparaissaient complètement «  (Beaudot 74)
Inconvénient, cela cristallise la créativité comme une entité fixe et non pas évolutive. Les test ne constituent pas une méthode d’apprentissage. Le contexte de la créativité est important comme en témoigne les similitudes des études de Guilford (Stenberg 2012).
La pensée mécaniste s’est emparée du XX°, le culte du détail sans considération du macrocosme de l’individu. Le retour à la conception de l’harmonique des sphères de la Renaissance et du monde de Kepler devient l’urgence, ce qui faisait dire à Malraux que ce XXI° sera spirituel ou ne sera pas. Le sens à donner devient humain, ou plutôt la définition de l’humanisme trouve ses réponses dans la poésie. La problématique en cours devient un projet créatif pouvant faire émerger la créativité de chacun par une poésie de l’idée, une poésie pédagogique. Un océan d’étoile répond à cette dimension.

1.2
Guilford (50) : « la complexité et la capacité à générer des idées nouvelles » (Brown 2010 p14)
approche qualitative (Osborn 65) comme le brainstorming
Débat, ilots étranges
révolution de problèmes de Parles et al. (62) (Lubart 2010)
élaboration de situations – problèmes comme tâche scolaire ou en formation pour favoriser la divergence.
le créatif apporte de nouvelles idées et cherche à rencontrer l’adhésion de ses contemporains
«  s’appuyant sur la discipline et la synthèse, l’esprit créatif innove. Il avance de nouvelles idées, pose des questions inhabituelles, invente de nouveaux modes de pensée, arrive des réponses inattendues. En fin de compte, il ne reste plus à ces créations qu’à se faire accepter par des consommateurs avertis » (Gardner 2009, p11)
Gardner introduit alors le notion d’innovation que l’on trouve aussi chez Csikszenrmilhalyi (96/2006) « est créatif un acte, une idée ou un produit qui modifie un domaine existant ou qui transforme en un nouveau domaine » (p.32)
psychologie différentielle « capacité à réaliser une production qui sit à la fois nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste » (Lubart 2010 p10) concepts clefs : nouveauté et adaptation.
La nécessité de la présentation de l’idée et de son appropriation par les pairs surgit. Les rôles des élèves dans les ilots ludifiés répondent à ce principe.
Le degré de nouveauté peut varier (Lubart 2010)
donc pour un enseignant il faut changer de pratiques mais aussi étudier le contexte.
Pour l’élève, il faut encourager son développement progressif avec des feed-back en quoi sa production n’est pas créative ou est créative par rapport aux contraintes.
La créativité doit donc être évaluée à partir d’une structure pré existante. une « pre-existing menta structure » (Boden 2005, p.76)
Est-il nécessaire d’assoir une forme ? Une idée ? Il me parait aussi important de considérer des micro-processus et en particulier celui de la curiosité dans la classe étrange, curiosité étant un facteur de désir. Devons nous penser alors à de nouveaux processus ? Des processus quantique si je reprends l’acceptation macro/micro processus ? Une gradation des processus permettrait de jouer les mécanismes de la créativité de façon plus fine.
les termes de découvertes et d’inventions ont une acceptation de « hasard » dans leur définition. La découverte s’appuie sur du connu, l’invention sur de l’inconnu. L’homme découvre ce qui existe déjà ( Colomb) et invente ce qui n’existe pas (Beaudot 74). La découverte n’est pas créative.
Ce sont ces fameux jalons. Peut on envisager les oeuvres du passé comme , en plus d’être des éléments constitutifs de créativité, comme des continents à explorer ? Peut-on étendre cette démarche à nos propres habitudes méthodologiques ? L’Atlas des ténèbres y répond.
L’invention peut devenir innovation si elle est reconnue comme telle dans son domaine. Sinon elle reste l’objet d’un bricoleur créatif (Levi Strauss 62)
Rouquette (2007) distingue l’usage privé de celle diffusé sur le marché. Notion de sérendipité : « the occurence and development of events by chance in a happy or beneficial way » (in Concise Oxford English Dictionary, Soane et Stevenson 2008 p.1313). Elle prend la forme de l’encodage sélectif (Lubart 2010) lorsque quelqu’un identifie la production d’un objet nouveau et potentiellement innovant.
Distinction entre pensée créative et créatrice (Puozzo Caproin et Martin 2014).
Vygotski (1930/2004) distingue deux formes d’activité de l’imagination : l’imagination créatrice et l »imagination créative ou combinatoire.
la premiere est la mobilisation de l’imagination en tant que reproduction d’expérience vécues telles quelles
La simulation, la ludification répondent de façon immédiate à cette première distinction. L’engouement pour les jeux vidéos peut aussi venir de ce désir de décadrage et de réappropriation de sa propre vie.
la deuxième modifie, combine et fusionne les expériences pour créer un processus nouveau. la pensée créative renvoie donc à ce mouvement de la cognition qui s’appuie sur l’analogie la divergence et la convergence. La créativité croise en plus des facteurs conatifs (relatifs à l’action : désir, volition, motivation, estime de soi, habitus, appartenance) émotionnels et environnementaux (Lubart 2010).
C’est là où les activités ludifiées prennent un sens profond, en ce qu’elles permettent et en particulier les pdt ouverts ou les jeux de rôles, une nécessaire mise en activité des facteurs conatifs, non considérés de façon ouverte par les tâches complexes qui pourtant en sont issues.

1.3
Natures de la créativité
créativité historique : production innovante pour l’histoire collective : électricité, elle reste dans le temps
créativité psychologique : capacité transversale mesurable et développable tout au long de la vie
Créativité (innovation sociale : mariage homo) et créativité (innovation pour l’environnement le la personne) ( C et c ) (Gardner 2006/2009)
mini-c : l’apprentissage personnel
Pro – c (professional) , niveau de son métier, contexte relatif comme un établissement pour un prof, un club de jazz pour un jazzman.
modele des 4C de Kaufman et Beghetto (2009)
logique linéaire de la créativité


Naturellement je n’aime pas les gradations car elles empêchent de considérer l’en-soi d’une expérience. Je ne vois pas non plus quelle utilité elles revêtent et je les conteste aussi dans la portée qu’elles empechent. Une invention mini-c peut avoir une incidence H-C des milliers d’années plus tard. Et quand bien même, elles impliquent que la société est plus importante que l’individu, ce que je nuance en précisant qu’une société plus importante qu’un individu pour moi est une société au service de l’individu. Quel autre destin d’une société peut se revêtir du manteau de l’importance de tous sans considérer chacun ? Il faudrait remodeler la définition de l’être pour cela, définition très séduisante actuellement par sa complexité mais tout à fait paradoxale sans la considération que chaque être est pensant (et ce quelle que soient ses pensées) et réfléchissant son ballet incessant entre extérieur et intérieur.

2 Pratiques pédagogiques

la créativité est définie en tant que compétence ou capacité
Est-ce déjà une limite ?
comment mettre en oeuvre la créativité dans les pratiques ?
conscientiser les nuances dans les créativités est une nécessité.
psychologie cognitive : pensée divergente ( génération d’un maximum d’idées) et pensée convergente («évaluer les idées et en retenir une) ou l’analyse des associations d’idées.
point de vue psychométrique : mesure de l’impact sur le développement en terme de mesure du potentiel créatif. Par exemple, la génétique dit qu’il y a des gens héréditaires de la créativité mais ce sont l‘environnement et les expériences qui permettent à l’individu de progresser.
les productions d’oeuvres créatives sont le fruit du climat social (Vernon 2010)
La variation des projets entre induction et déduction prend un sens concret ici. Vaut-il mieux une mini-c par un individu avec peu de potentiel qu’une H-C ignorée de beaucoup de personnes ? Pourquoi faire une gradation qualitative ? Permettre l’excellence à chacun , c’est donc proposer des situations d’émergence de la créativité pour tous.
2.2
Craft propose d’après Ken Robinson en 2005 implémentée les pistes théoriques dans la pratique en Angleterre
enseignement créatif : présenter des aspects plus attractifs, comme des idées de mise en situation d’apprentissage (faire du théâtre pour apprendre les langues), rendre l’enseignement plus individuel avec des programmes type learning apps. Il faut aussi qu’il pense à laisser la créativité des élèves s’exprimer.
apprentissage créatif : construire un apprentissage par la créativité jouant un rôle explicite sur l’acquisition de compétences ou de connaissances. il y a un retour sur la créativité alors dans un cercle vertueux.
Peut on envisager une formation spiralaire des enseignants autour de ce principe ? Eduscol propose ce genre de pensée de façon précise et intelligente je trouve (spirale e). Un parcours cartographié serait tout aussi envisageable, un parcours personnel non évalué par l’institution, une carte spherier pour l’enseignant. Elle permettrait l’avancée progressive sans la culpabilité d’échouer face à ce torrent vertigineux de compétences.
On remarque une déstabilisation au début, empathie et accompagnement sont obligatoires. La tâche complexe peut apparaitre.
on peut aussi donner plusieurs objets à l’élève à condition qu’il puisse en saisir les concepts de construction. aucune approche n’est meilleure qu’une autre sinon celle la plus efficace sur la créativité des élèves. Pour l’instant l’auteur s’appuie sur une recherche socio-cognitiviste ( Capron Puozzo 2014) pour définir une pédagogie de la créativité dont l’objectif est de développer un nouveau rapport au savoir, l’envie d’apprendre tout au long de sa vie.

3 description des chapitres du livre

Csikszentmihalyi : la créativité c’est « 1% d’inspiration et 99% de transpiration » (1996/2006 p81)
description scientifique de l’évolution du concept de créativité en tant que macro et microprocesseurs cognitif
concept hoilistique dont les microprocesseurs sont de natures émotionnelles conatives et environnementales
potentiel créatif de l’individu est une variable à observer analyser stimuler et évaluer, c’est une approche multivariée.
l’imagination est à développer grandement dans l’apprentissage
les neurosciences apportent un éclairage au niveau du corps en tant qu’entité physiologique, réceptrice et productive de créativité.
les pratiques artistiques sont favorables à la créativité dans une approche énactive (lien d’action possible sur l’environnement entre une subjectivité du monde et une objectivité possible donnée par la représentation).
l’interdisciplinarité est une voie fertile en innovation dans la création de situation favorables à la créativité
la créativité est possible dans le collectif et particulièrement grâce à la musique
on peut analyser les microprocesseurs de créativité en observant les macroprocessus durant des marathons de créativité
modéliser par une ergonomie cognitive permet de situer les contraintes et de proposer des systèmes informatiques d’aide à l’émergence de la créativité.

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