Créer une Murder Party

Une Murder dans son sens le plus ancien, pour Murder Party, ou soirée enquête, est une forme dérivée du jeu de rôle. Il a pour but de résoudre une enquête en dialoguant entre joueurs, chacun d’entre eux possédant une partie du puzzle qui constitue l’énigme.

C’est une forme croisée entre le jeu de rôle, le théâtre d’improvisation et le puzzle-cluedo, c’est l’ancêtre de l’escape game qui en est une forme particulière. Il arrive fréquemment que lors de soirées costumées, on puisse créer un décorum adapté. J’ai organisé ce genre de soirées il y a 25 ans, j’ai construit et composé il y a douze ans une comédie musicale interactive sur ce principe (Mystère sur l’Empire), sur un jeu/tâche complexe Dérobée à l’Opéra présenté lors du premier Edmus à Toulouse il y a sept ans, jusqu’à plus récemment où lors d’un Edmus Connect il y a quatre ans à Tours, j’ai pu co-organiser et créer scénaristiquement un escape game pour une centaine de personnes.

Pour cet évènement j’avais créé une méthodologie de création d’escape et co-animé un atelier de conception d’écriture interactive (que l’on peut retrouver sur internet surement quelque part, je crois sur le site de l’APEMu ?).

En reprenant ce principe, voilà une méthodologie simple pour créer votre propre Murder Party avec les élèves.

Les avantages de ce dispositif sont nombreux, à commencer par la répétition et l’appropriation de notions. Une notion peut être répétée plus d’une vingtaine de fois lors d’une seule partie. Cette répétition entraine donc une facilité de réactivation lors des révisions. L’appropriation entraîne la concentration bien sur. Et comme toujours avec le jeu, il initie à la citoyenneté par l’échange permanent avec autrui, aux règles et surtout au respect des règles, il n’a pas besoin d’autre motivation que lui-même pour exister et perdurer puisque le plaisir entraîne l’envie de jouer dans un cercle vertueux, il circonscrit enfin le savoir par les règles et le contenu ce qui aide à la focalisation des recherches. 

J’utilise la même méthode depuis vingt-cinq ans, que j’ai eu le temps d’éprouver, et qui est très simple :

  • Je construis un tableau / tableur avec autant de colonnes que de personnages
  • Je crée autant de lignes que de temporalités, de dates, d’heures suivant l’énigme
  • Dans chaque case je marque qui est où : quel personnage dans quel lieu.
  • Je crée des alibis de deux natures : soit des personnages sont ensemble et prouvent mutuellement leur innocence, soit ils sont seuls et donc on peut appliquer le principe qu’ils sont présumés innocents sans preuve du contraire (ce que les joueurs évidemment réfutent et qui crée de fausses pistes).
  • Une seule case est en incohérence avec le reste, et le moyen le plus facile d’y arriver est que la personne ne puisse pas être à ce moment là dans cet endroit là, parce que d’autres ne l’ont pas vu alors qu’ils auraient du : Paul dit qu’il est dans la chambre à 14h mais c’est impossible parce que Jacques, Françoise et David y étaient à ce moment là mais ne l’ont pas vu.
  • Chaque joueur possède avant le jeu sa propre histoire, et donc toute la colonne de son personnage, avec interdiction de communiquer sur ce point avant le temps d’échange.

Dans ce scénario, les personnages sont des voyageurs du temps qui s’incarnent dans des compositeurs. L’un d’entre eux cherche à dérégler le continuum espace temps (on parle en cours de continuum des syntagmes mais ce ne sont que mes cours).

En voici le teaser.

Ce tableau ci dessous est à l’usage de l’enseignant, les élèves ont à disposition la colonne de leur personnage, sans couleur. Il n’est pas obligatoire que l’élève sache qu’il est le coupable, même si le fait de le préparer à ça peut être prudent, en particulier pour les plus jeunes. Cette murder a été jouée en lycée, mais pour le collège, un autre thème plus doux où l’élève serait en position plus légitime (une marginalité plus héroïque comme Robin des Bois, un rebelle Jedi etc.) est à mon sens préférable, et de loin. Les plus grands au lycée, au contraire, seront plus enclins de jouer à l’antagoniste, avec prudence et dosage bien sur. Dans cette murder par exemple, il n’est pas question d’un meurtrier et le crime appartient au registre imaginaire.

En couleurs : les alibis avec témoignages  / En blanc : sans alibi / En noir : case illogique

Une autre murder ici : http://flipmusiclab.fr/murder-de-noel-2024/

Les variantes sont nombreuses et les possibilités ouvertes : 

Il peut y avoir davantage de coupables, si vous voulez la refaire Orient-Express alors ne laissez aucun alibi sans preuve, ce sera donc l’unique solution possible. 

Si vous voulez créer deux ou plusieurs coupables, créez une sous-intrigue avec deux cases illogiques en liant les deux suspects dans la narration par un élément extérieur de leur histoire personnelle (ce qu’on appelle le background en vocabulaire rpg) comme la murder de Noël ci-dessus.

Vous pouvez jouer avec les temporalités comme dans Ils Étaient Dix en donnant les informations à différents moments. Vous pouvez alors acclimater les personnages en divisant le jeu en deux phases par exemple, 15 minutes de jeu avec une partie des informations, 15 minutes avec une autre. 

Vous pouvez augmenter l’appropriation avec une phase de jeu où les joueurs peuvent mentir puis une autre phase où ils doivent absolument dire la vérité.

L’immersion sera plus grande si les joueurs ont du temps pour se préparer physiquement avec des accessoires costumés selon les univers de jeu que vous proposerez. Je n’ai jamais procédé ainsi au collège ou au lycée mais plusieurs fois hors temps professionnel, effet waouw et photos mémorables garantis.

Voilà l’exemple de ma dernière Murder en date , il y’a trois mois, au lycée. Une heure de jeu, une fois que tous les rôles sont distribués, et la consigne ou teaser lancés, il n’y a plus qu’à regarder les choses se faire. Il dure environ une heure trente maximum.

N’hésitez pas à les inciter à répéter les informations, à échanger avec le maximum de personnes et à noter les informations. Observez les stratégies d’acquisition et de recherche se mettre en place toutes seules, c’est très réjouissant.

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